Journée internationale des femmes 2021: réflexions entre deux vagues

Journée internationale des femmes 2021:
réflexions entre deux vagues

Commémorée en temps de pandémie, cette Journée internationale des droits des femmes éveille des sentiments ambivalents, entre lassitude et rage de vivre.

8 mars, Journée internationale des femmes

Depuis plus d’un siècle, chaque 8 mars, le monde rend hommage aux femmes, avec plus ou moins de respect concret pour leurs droits humains fondamentaux.

En cette aube de printemps 2021, la fête prend une saveur particulière. Aigre-douce, douce-amère… entre espoir et nostalgie, révolte lasse et fatigue persistante, entre éloignement physique et sororité distanciée.

Voici tout juste un mois, la Suisse commémorait le 50e anniversaire  de l’octroi du droit de vote à ses citoyennes. En 1971, j’avais sept ans, maman en avait trente. Quant à mes grands-mères, elles n’auront rien su de cette révolution trop tardive.

Voici tout  juste un an, nous plongions, chacune et chacun d’entre nous, tous âges et toutes latitudes confondues, dans une crise plus inattendue qu’imprévisible. Le sentiment de toute-puissance n’était dès lors pas plus masculin que féminin, pas plus rétrograde que féministe. L’humanité dans sa totalité se retrouva soudainement paralysée, réduite à se cacher dans les replis de sa peur, à la merci d’un virus inconnu.

Voici un jour à peine, mes pensées se perdaient quelque peu dans une brume de souvenirs teintés de nostalgie, une brume gris-jaune comme l’étrange ciel de ces dernières semaines. Un plafond bas, ensablé… à l’image de mon esprit enlisé.

Je pensais à nous. A vous, à moi. A ce traumatisme collectif dont, sans doute, nous n’avons pas encore pris l’incalculable mesure. Je pensais à nos insouciances perdues, à nos certitudes fracassées, aux centaines de milliers d’âmes envolées. Soudain prise de vertige, comme en équilibre au bord du monde…

Un souvenir de vie en rose

Dans ces moments de déséquilibre, alors que le découragement nous fait trébucher, nous cherchons à nous raccrocher à quelques repères salvateurs, collectifs ou individuels. La ronde des saisons, une date anniversaire, une commémoration, une fête, une trace dans notre mémoire d’événements inoubliables, heureux ou malheureux, qui jalonnent nos routes.

Au seuil du 8 mars, c’est bien la journée dédiée aux femmes qui a redonné des couleurs et de la positivité à mes ruminations dominicales.  Je nous ai revues en grève – ou plutôt en fête – un 14 juin chaud comme un jour d’été, envahissant les rues d’une majestueuse vague de rose, fuchsia et violet. Union joyeuse et solidaire, partage du coeur, destin commun en même temps que particulier à chacune, à chacun.

Aujourd’hui, en ce lundi de mars 2021 sous un pâle soleil, c’est une image de foule colorée, une évocation de vie en rose, qui m’est revenue en mémoire… avant de réapparaître dans mes archives photographiques. Je m’en suis trouvée éblouie de gaieté, au milieu de couleurs vivantes et vivaces. Au milieu de tout ce monde… une image d’avant – deux ans, seulement – qui réjouit, qui réchauffe, en même temps qu’elle serre le coeur.

D’une vague à l’autre

Toutes ces femmes, toutes ces âmes, ici et ailleurs, unies aujourd’hui dans une commémoration de genre, unies aussi dans une lutte contre un virus mondial, contre une maladie qui -ironie – hésite encore entre deux genres. Selon l’Organisation mondiale de la santé, les femmes sont les plus exposées à la pandémie: en première ligne par leur engagement professionnel, social, sanitaire, familial, éducatif. Les petites filles sont les plus à risque de ne jamais retrouver l’école et l’autonomie que permet l’accès aux études.

Une année de pandémie mondiale. Une moyenne de seize années de vie perdues pour chaque être humain emporté par la Covid-19, selon une récente étude parue dans la revue Nature. Des années de progrès sur la voie de l’égalité réduites à néant, selon le secrétaire général de l’ONU Antonio Guterres. La vague qui nous emporte dans ses flux et reflux a perdu ses couleurs.

Il nous reste l’espoir. Notre force de résilience. Notre combativité. Mais rien de cela ne suffira tant que nous ne respecterons pas le vivant dans toute sa diversité. Si nous perdons dans cette sombre aventure notre illusion de toute-puissance, c’est tant mieux. Car à force de vouloir dominer la nature, nous l’avons dressée  contre nous.

Les conséquences de nos inconséquences

Le chaos dans lequel nous pataugeons n’offre guère de visibilité sur ce que pourrait être «le monde d’après». Mouvante comme les sables, la réalité actuelle se heurte à de beaux concepts: celui d’un nouveau siècle plus féminin, plus spirituel aussi; celui d »un retour à la nature, à une vie plus simple.

Après ce choc frontal avec les conséquences de nos inconséquences, il nous appartient déjà – et sans doute pour toutes les années à venir – de rassembler, trier et balayer les morceaux épars de nos vies, de nos illusions et de nos égarements. De reconstruire ensemble un art de vivre, un art du vivre ensemble: femmes, hommes et nature. Avec pour ciment une dimension plus spirituelle. Avec pour charpente un salutaire retour à l’essentiel.

 

L’ARTICLE EN BREF

Catégories: pandémie, changement, réflexion

Mots-clé: femme, société, nature

LA MISE EN IMAGE

Vague féminine dans les rues de Genève, 14 juin 2019. Image du monde d’avant. Aujourd’hui, rester unies malgré la distance.
©L’île intérieure