Dans la foule des visiteurs, le plus simple des hôtes. Sans doute le plus connu aussi, dont le sourire exprime la chaleur du coeur.
Le plus humble des hôtes… le plus paisible à l’intérieur. Matthieu Ricard a promené sa sérénité d’un espace de rencontre à un plateau de télévision, activement présent, parce que lorsqu’on le demande, il descend de son ermitage.
Pourtant, on le croit volontiers, c’est bien chez lui qu’il avait le plus à coeur de se trouver, parmi des centaines de moines bouddhistes se démenant pour soulager les blessures d’un peuple mis à terre, si fragile face aux éléments naturels, mais immense dans sa dignité.
Chez lui, c’est au Népal, qu’il a quitté juste avant un terrible séisme*. Et qu’il avait hâte de retrouver. Il n’en a pas moins pris le temps de partager avec nous quelques instants de sagesse, comme pour nous aider à retrouver le chemin du bon sens. Généreux de son temps, conciliant, patient au milieu de l’agitation.
Dans cette bruyante « foire » qu’est le Salon du Livre de Genève, où l’on ne s’entend plus parler, distrait par tant de stimuli que c’est à en perdre la faculté de seulement parcourir une quatrième de couverture, Matthieu Ricard a parlé de l’homme bon, d’un monde meilleur, de notre élan naturel vers l’altruisme et la compassion. Un plaidoyer qui sonne juste, qui sonne vrai de la part d’un homme et d’un moine bouddhiste pour qui il ne s’agit pas là de concepts, mais d’une réalité quotidienne.
Il n’est pas venu pour faire la promotion de quoi que ce soit d’autre que la générosité des uns envers les autres. Ses livres, il en parle seulement quand on lui pose des questions. Par politesse, il répond… et il convient de savoir qu’un livre vendu, c’est un peu d’argent pour son association Karuna-Shechen.
Par l’altruisme qui nous est naturel, par la méditation à pratiquer en toute simplicité, Matthieu Ricard nous transmet un message essentiel: il est possible de développer la paix avec soi-même, de se mettre en paix avec le monde.
La valeur du silence
En quittant le Salon du Livre, les mains vides et le coeur rempli d’un beau message d’espoir, je me suis prise à rêver. M’est revenu le souvenir de ces moments de grâce, lors de retraites méditatives accueillant des centaines de personnes, où un simple son de cloche établit un merveilleux silence, une communion muette d’une intensité à vous faire monter les larmes.
Si pour sa trentième édition, l’an prochain, le Salon du Livre de Genève ose tenter cela, alors j’y retournerai. Au vu de l’affluence des visiteurs sur la «Place du Moi» – où se bousculait tout ce que l’édition produit en matière de développement personnel – et lors des interventions de Matthieu Ricard, c’est peut-être cela que bien des amoureux des livres recherchaient en ce lieu: un espace où le calme, le silence, la lecture et la méditation trouveraient leur place légitime.**
Dans ma bibliothèque, à la maison, m’attendait L’art de la Méditation***, de Matthieu Ricard. Et le silence, si nécessaire pour que les mots trouvent le chemin du coeur.